La 3D, concept ou géométrie ?
Le monde du bâtiment a vécu dans les années 2010 une révolution dans ses méthodes de conception en passant de la 2D à la 3D…. En fait, on parle souvent de 3D pour désigner un concept beaucoup plus vaste de conception 3D ou de base de données d’objets 3D : Dans la construction, ce concept à un nom : BIM (Building Information Modeling). Le BIM a révolutionné le monde de la conception des bâtiments dans les années 2010 et devrait poursuivre cette révolution dans la construction et surtout l’exploitation des bâtiments dans les années 2020.
J’aime comparer le BIM à un iceberg dont la partie émergée est justement la 3D. Lorsqu’on présente le modèle BIM d’un bâtiment, la 3D est la première chose que l’on voit et son impact est encore significatif par rapport aux traditionnels plans 2D. On ne peut pas nier que la révolution du BIM dans la construction n’est ni plus ni moins que celle de la CAO dans l’industrie il y a plus de 20 ans. Néanmoins, les technologies numériques ont nettement évolué et permettent de transformer les modèles 3D en outils impressionnants de réalisme, de fluidité ou encore d’immersion. Je vous montrerai dans cet article que pour bien utiliser ces outils 3D, la vraie richesse, c’est en fait la partie immergée de l’iceberg, c’est-à-dire la base de données interopérable qui se cache derrière les objets 3D composant le modèle du bâtiment.
Se projeter, mieux impliquer les futurs utilisateurs
La 3D dans la conception des bâtiments a comme première vertu de permettre aux clients de bien mieux comprendre les plans avant la construction. Normal, le cerveau humain est fait pour voir en 3D et non en 2D. Ainsi, on se rend mieux compte des volumes, des couleurs, des agencements… bref de la première impression qu’on aura en rentrant dans son futur bâtiment. La 3D, même dans le bâtiment, n’est absolument pas nouvelle et les architectes proposent dans chaque permis de construire depuis des années des « perspectives » et des « insertions sur le terrain ». Ce qui change en revanche c’est que ces perspectives étaient souvent réalisées en parallèle des plans 2D. On faisait le travail deux fois, avec le risque quasi assuré de ne pas avoir une image 3D juste sur le plan technique. Les images 3D étaient alors trop souvent limitées à quelques vues, et rarement le reflet honnête de la réalité.
En concevant en 3D, on s’occupe de la technique et de l’esthétique en même temps et sur le même modèle (mais avec différents experts !). Nous ne sommes plus limités à la présentation de quelques vues 3D qui ont été travaillées par les infographistes mais on peut choisir n’importe quel angle de vue. Alors que les calculs de rendus 3D pouvaient prendre plusieurs heures avant l’image finale, les technologies récentes de jeux vidéo viennent nous aider à transformer désormais en temps réel un modèle 3D en une expérience immersive de visite virtuelle. Depuis que nous avons mis en place cette technologie chez GSE, nous avons pu impliquer nos clients de façon bien plus opérationnelle dans la conception et le choix des finitions. Ils peuvent visiter leur futur bâtiment en réalité virtuelle avant la pose de la première pierre, mieux comprendre et exprimer leurs besoins… Nous mesurons aujourd’hui une véritable amélioration de leur satisfaction grâce à cet outil.
Mieux concevoir des projets complexes
Mais la 3D n’est pas seulement un outil utile aux « non professionnels ». Dès que la complexité des projets s’accroit, les architectes, les ingénieurs et les maîtres d’ouvrage y voient eux aussi leur intérêt. Dans le monde de la logistique, nous voyons aujourd’hui les entrepôts devenir de véritables usines logistiques avec des process de plus en plus complexes. La 3D est aujourd’hui presque indispensable dans une bonne synthèse entre le bâtiment et le process.
Nos ingénieurs utilisent également les outils 3D ou plutôt l’interopérabilité des objets 3D qui composent un modèle de bâtiment pour gagner en temps et en qualité. En effet, l’économiste, l’ingénieur structure ou l’ingénieur thermicien peuvent désormais utiliser le modèle BIM de l’architecte directement pour calculer le prix, la structure ou la qualité thermique du bâtiment sans avoir à le remodéliser. Ils y gagnent en temps et réduisent les risques d’erreur de ressaisie. Sans compter qu’en travaillant de la sorte, Il est alors possible de mettre à jour les études en temps quasi réel dès qu’une modification architecturale est proposée. Chez GSE, nous utilisons cette méthode pour permettre de concilier adaptabilité, compétitivité et très hautes performances environnementales des bâtiments logistiques que nous construisons.
Et nous n’en sommes probablement qu’au début avec l’apparition du Design génératif, c’est-à-dire la génération automatique par l’ordinateur de millions de modélisation pour trouver la meilleure !
Au-delà de la 3D, surtout dans le monde de la logistique ou la rapidité de construction est primordiale, les maîtres d’ouvrage apprécient particulièrement la 4e dimension que peut apporter le BIM. Le planning de construction d’un entrepôt, habituellement composé de centaines de lignes sur un diagramme de GANTT, devient une vidéo 3D de la construction. Mieux qu’une vidéo, un véritable modèle 4D dans lequel on peut non seulement s’immerger virtuellement mais à n’importe quelle date. Les méthodes de construction, d’accès, de livraison sur chantier peuvent alors être mieux travaillées et donc optimisées. Là encore, l’intelligence artificielle et certaines start-ups de la construction commencent à proposer une véritable modélisation du chantier pour trouver le meilleur planning qui soit.
Le jumeau numérique pour mieux exploiter son bâtiment dans le futur
Mais la 3D ou le BIM ne doit pas s’arrêter à la conception/construction des bâtiments. Il est un formidable outil de base pour servir l’exploitation des bâtiments.
Par exemple, chez GSE, nous livrons désormais un Dossier d’Ouvrages Exécutés en BIM. Cela ne veut pas dire que tous les détails d’exécution sont modélisés en 3D : ce serait probablement trop lourd pour les appareils mobiles qui doivent servir à l’exploitation. Mais le modèle 3D est composé de la totalité des objets 3D qui composent le bâtiment. Même simplifiés graphiquement, ces objets 3D corrects sur le plan des dimensions et du positionnement servent de base de données graphique à l’ensemble des documents techniques du dossier d’ouvrages exécutés. On remplace ainsi les dizaines de classeurs, remplis de fiches techniques classées par entreprises de réalisation, par des documents techniques numérisés dans le cloud et accessibles à travers un modèle 3D sur sa tablette.
Ce concept de base de données du bâtiment, à interface 3D, représente ainsi le jumeau numérique du bâtiment tel que construit. On peut imaginer faire vivre ce jumeau numérique pendant l’activité du bâtiment en y intégrant par exemple les opérations de maintenance effectuées ou en ajoutant les données des capteurs de mesure du bâtiment qui se multiplient avec l’explosion de l’IoT. Le BIM permet à ce jumeau numérique d’être normalisé et interopérable avec l’ensemble des logiciels de la construction. Il reste encore à normaliser ces modèles 3D selon les logiciels d’exploitation. Enfin il faudra faire communiquer ces outils BIM avec les outils industriels, notamment liés au process dans les bâtiments logistiques.
Selon moi, le jumeau numérique 3D est clairement l’outil d’exploitation du futur. Les premiers bâtiments logistiques pilotes commencent à en être équipés. Les technologies de réalité augmentée ou mixte sont très prometteuses pour rendre la 3D excessivement simple à utiliser dans les prochaines années.
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